A la rencontre des Rustines
‘’Ciao les Rustines on se retrouve demain comme convenu à Barcelonnette vers 14h00’’ ! La nuit est agitée je suis excité comme un pou dans une salle de classe et nul besoin de réveil pour sauter du lit, engloutir le petit déjeuner et me retrouver sur mon destrier d’acier.
Il est 7h00 du mat je me laisse descendre vers le plateau de Brié pour aller prendre le TER à la gare de Jarrie. Dans l’excitation du moment j’ai enfilé mon t-shirt à l’envers et tout au long de la journée c’est ainsi que je vais évoluer à l’envers de ce qui était prévu !
Le beau temps est de la partie, la fraicheur du matin est agréable, à mon habitude j’ai pris une marge par rapport à l’horaire de départ de mon train et je ne vais pas le regretter quand l’employé à la gare me voyant débarquer avec mon vélo rallongé d’une troisième roue que Marco m’a confié s’exclame immédiatement sans m’avoir demander où je souhaitais aller ‘’je crois que pour vous cela va être difficile’’ !!!
Il vient de prendre son service et me confie qu’aujourd’hui le jour où je vais rejoindre les Rustines eh bien c’est un jour de retrait !!! Késako un jour de retrait ? En fait il y a un préavis de grève et tous les trains au départ de Jarrie sont annulés mais, mais il s’empresse de me dire qu’il y a un bus pour Gap à 10h30 à la gare de Grenoble.
Qu’à cela ne tienne j’enfourche le vieux Sunn et je me mets en mode dépêche-toi Raymond car je sens immédiatement que cette journée ne sera pas une journée comme prévu !
Après Pont de Claix j’enquille la grande ligne droite du cours St André, au passage un petit stop à la concession auto où bosse l’ami Gillou qui rentre juste de vacances et go to la Gare .
‘’Le chauffeur de bus à mon avis ne va pas prendre votre attelage dans son bus ! Je vous conseille de prendre le TER qui part dans 5 minutes pour Valence et ensuite le TER Valence Briançon qui passe à Gap’’ me confie la jolie stagiaire aux yeux en amande. Qu’est-ce que je disais ce n’est pas une journée ordinaire…
Pourvu que Micha ouvre sa boite mail ce matin car l’arrivée à Barcelonnette ne sera pas à 14h00mais à 18h00 et des patates
‘’Allo Pitcha, je suis dans le TER en direction de Valence. Valence mais qu’est-ce que tu vas faire à Valence ? Je t’explique ‘’blablabla….’’ Peux-tu skyper Mimi pour lui expliquer la situation au cas où elle n’ouvre pas sa boite mail’’.
La magie des nouvelles technologies fait que tout est clair pour tout le monde et que finalement après avoir fait chauffer le Smartphone on va se retrouver non pas à Barcelonnette mais vers Serre Ponçon devant l’église du village d’Espinasses.
La pression retombe je sors la Kobo et me plonge dans le polar en cours jusqu’à Valence. Changement de TER et hop je suis dans celui qui se dirige vers ma destination qui sera en fait Chorges située à une vingtaine de km d’Espinasses.
Le nez collé à la vitre je reconnais cette vallée du Diois que j’aime tant, une pensée pour mon ami Jean-Marie en croisant Crest et nous voilà à Die où le haut-parleur du wagon se met à cracher une suite incompréhensible de messages mais le seul que je retiens me fait comprendre qu’un arrêt de 45 minutes nous bloque en gare de Die ! Grrrrrrrrrrrrr !!! Eh oui le gars de la gare de Luc en Diois est malade et personne ne peut le remplacer, donc il nous faut attendre le train qui vient en sens inverse en Gare de Die pour effectuer le croisement ! Gloups, gloups !!! Oui c’est possible avec la SNCF ReGrrrrrrrrrr !!!
‘’ Pitcha ! ‘’Blablabla…. Les Rustines Blablabla….. ‘’
Que d’émotions ! Mais finalement me voilà seul sur la route avec mon vélo et ma troisième roue chargée de tout mon barda qui va me permettre de suivre les Rustines et de bivouaquer avec eux pour les accompagner dans leurs derniers tours de roue après leur très joli périple Asiatique.
Je longe le lac de Serre Ponçon et je suis heureux, Espinasses n’est plus qu’à quelques kilomètres et j’ai hâte de serrer dans mes bras la Tit Rustine et le Tigre de Vaulnaveys. A la fois un peu déçu d’être seul et de ne pas être accompagné de Thomas et de Vincent. Le premier est frustré car les Rustines ont modifié ses plans avec leur retour avancé et le second joue à papi nounou avec ses petits-enfants. Mais au fond de moi je crois que très égoïstement, je suis fou de joie d’être tout seul aujourd’hui.
Les retrouvailles attendues
Espinasses, l’église, et là je surprends les Rustines qui m’attendaient mais qui pensaient que j’allais arriver par la route opposée !
Embrassades, émotions partagées, câlins à ma petite Micha, on est tous les trois heureux de ses retrouvailles mouvementées mais très vite il nous faut trouver un abri car l’orage qui menaçait nous envoie la première escouade sous forme d’une légère averse et… remettre mon t-shirt à l’endroit J
Ça y est je suis une Rustine mais pas une Rustine Libérées non, non, non !!! Je suis, dixit les vrais Rustines, une Rustine………………… Retraitée !
Nous nous réfugions sous la tonnelle d’un café pour nous désaltérer et nous raconter finalement peu de chose car hier encore nous étions ensemble via un écran interposé et donc c’est de la suite du voyage et de l’itinéraire que nous allons discuter ensemble.
La patronne du café nous refile le bon plan pour la nuit et hop dès la fin de l’averse nous rejoignons l’emplacement de notre premier bivouac ensemble au bord de la Durance.
La magie du bivouac avec les Rustines
Et là, là je peux vous dire que j’assiste à un festival de la part des Rustines qui me bichonne tout en vaquant à leurs préoccupations quotidiennes pour installer le camp, monter les tentes, lancer le repas du soir et nous laver dans l’eau de la Durance dans laquelle nous feront plus tard la vaisselle ! Eh oui c’est ça le bivouac aussi !!!
La magie du bivouac avec les Rustines c’est de les voir s’activer et de comprendre leur organisation, leurs gestuelles, leurs habitudes etc… De leurs sacoches de vélo sortent la logistique du bivouac et les réserves de nourriture qu’ils n’ont pas oubliés de faire dans la journée en prévision des repas.
A l’aide de leur ingénieux réchaud fabriqué avec une canette de boisson gazeuse Jérémie nous concocte un plat de courgettes avec oignons, tomates, champignons et un plat de pâtes ! Tout ça en un tour de main en piochant dans ses sacoches pleines à craquer. Je ne suis pas étonné du poids de son vélo quand je vois tout ce qu’il trimballe et je comprends mieux pourquoi ses roues ont tant souffert !
Diner au bord de la Durance assis sur la « Magic Rabanne » offerte par des moines qui les avaient hébergés au Laos, refaire le monde, revivre leur voyage, parler de la famille et des amis, raconter les dernières nouvelles, tirer des plans sur la comète pour les prochains jours, se marrer, se regarder, se sentir bien ensemble…..le bonheur partagé tout simplement, je me sens bien, je suis heureux !!!
Bonne nuit les Rustines et je me glisse dans ma tente de montagne des années 70 qui nous demandera avec Micha un montage démontage supplémentaire pour qu’elle soit correctement tendu. Cette vieille tente, c’est celle-là même qui avec Pitcha et Jojo nous a servi de camp de base dans de nombreuses randonnées et bambées d’alpinisme. Séquence nostalgie….
Après une nuit douce, les premiers rayons du soleil des Hautes Alpes nous sortent de notre tanière. Chacun s’affaire à plier et ranger ses affaires pendant que le petit déjeuner se prépare et que les tentes sèchent. Les Rustines font preuve d’une grande efficacité pour remballer tout le barda. Chaque chose prend place dans les sacoches, les sous-vêtements et la serviette de toilette finiront de sécher sur le vélo.
Tour de roues et papotage
Mon premier jour de vrai cyclomigrateur commence par une balade champêtre et vallonnée sur les contreforts de la Durance. Chacun prend son rythme et à la moindre occasion nous roulons de front pour profiter de ces instants. Les Rustines me narrent leurs aventures de l’autre bout du monde et nous avançons tranquillement à l’allure qui nous convient. Les gens se retournent sur notre passage bien entendu car nous ne passons pas tout à fait inaperçu. Je ne suis pas peu fier de faire partie de cette équipée qui m’entraine vers le premier objectif le col d’Espréaux. Je roule serein, fredonne des airs que j’aime bien et je pense à mes parents en entonnant I wish you were here !
Qu’on se le dise les Rustines ce qu’ils aiment c’est le passage d’une vallée à une autre matérialisé par LE COL. Celui-ci est un petit col bien sympa desservi par une toute petite départementale qui grimpe régulièrement en traversant cette belle campagne au pied des falaises de Céüse haut lieu de la grimpe du Gapençais. Nous faisons la pause casse-croûte et la sieste dans le jardin public du petit village de Barcillonnette. Le col d’Espréaux est finalement vite atteint et le final se fait dans un décor de marnes schisteuses typiques de la région. Au col nous faisons une sympathique rencontre avec deux cyclos Lyonnais qui se rendent à Nice. Et bien entendu l’inévitable question ‘’ où allez-vous ?’’
‘’Ben ! On rentre chez nous après 11 mois de vadrouille’’
‘’Ah ouais !!! ‘’ Et là leurs yeux s’illuminent aux bribes de récits des Rustines qui à tour de rôle leur font partager cette expérience. C’est sûr ces deux-là auront un sujet de discussion pour la journée….
Surprise avant la tempête et gros orage
On encape la descente vers Veynes et c’est dans une clairière que nous allons planter notre deuxième bivouacs ensemble. Le lieu et propice car l’orage menace et cette clairière bordée par la rivière qui sera notre salle de bains plus tard a l’immense avantage d’être dotée d’une maison avec un abris à bois et un abri barbecue équipé de table et chaises. C’est une maison de week-end très probablement et les proprios ne sont pas là, on en profite. C’est le bon choix, nous serons ainsi au sec quand le déluge arrivera juste après la pause thé.
Mais avant la tempête Madame La Biche vient prendre du bon temps dans cette clairière et s’offrir un festival de plantes délictueuses juste devant nous à quelques mètres. Elle ne nous a pas vu ni entendu. Elle s’affaire dans les hautes herbes avoisinantes pour finalement se coucher et se délecter de graminées sans se fatiguer. Nous apercevons ses deux grandes oreilles qui tels des radars sont en constante recherche du moindre signal.
Elle reste ainsi pendant un bon quart d’heure et tout d’un coup elle sent notre présence et nous découvre à quelques mètres d’elle seulement. Il ne lui faut que de brèves secondes pour s’élancer et s’éloigner de nous dans un festival de sauts élégants que nous garderons en mémoire. Belle rencontre, merci Madame La Biche !
Coup de tonnerre, vent violent et rafale qui balaye la cour de la maison. La pluie arrive subitement et la température chute immédiatement. Le sol se couvre de grêlons et nous nous blottissons contre les parois de l’abri pour ne pas être trempés. Ouf !!! Nous sommes à l’abri et c’est tant mieux car ce n’est pas un simple orage. Celui-ci est suivi d’une forte pluie qui dévale les pentes avoisinantes pour former une multitude de cascades alentour.
En soirée la pluie cesse et nous pouvons monter les tentes sous l’abri et préparer le repas. Enfin nous c’est surtout Jérèm qui s’y colle comme d’habitude et le Tigre de Vaulnaveys excelle dans l’art de préparer un repas amélioré pour le bivouac avec les légumes, pâtes, fruits et fromages achetés au passage. Ce soir ce sont des criques délicieuses faites maison avec un plat de spaghettis à la sauce améliorée que Jérèm nous a concoctés. Nous sommes bien installés dans cet abri mais le froid nous oblige tout de même à nous vêtir un peu plus chaudement.
Les Rustines me dorlotent et j’en profite!
Repus et réchauffés après une soirée encore bien sympa à revisiter le répertoire de nos discussions préférées, nous nous laissons emporter par un sommeil réparateur avec nos rêves respectifs qui nous plongent dans une nouvelle nuit.
Le Dévoluy comme décor et 14000 kilomètres dans les mollets
Aujourd’hui après avoir remis dans l’état que nous avions trouvé l’abri c’est une descente toute en douceur vers Veynes pour nous lancer dans l’ascension du Col du Festre qui est bien modeste en altitude en comparaison des cols à plus de 4000 mètres franchis par nos deux tourtereaux.
Petit arrêt rapide pour remplir les sacoches de Jérèm avec de quoi se sustenter à midi et ce soir et nous voilà partis à l’attaque de ce col dominé côté sud par la montagne d’Aurouze et un peu plus à l’est par le Pic de Bure et ses oreilles de Mickey qui scintillent au soleil. Entre les deux la combe de Mai et la combe d’Aurouze nous donnent rendez-vous le prochain hiver avec nos peaux de phoque.
Un vent bien marqué de face nous contraint dès le début de la vallée à forcer un peu sur les pédales. Au col on aperçoit une vague caractéristique de nuages poussée par le vent du Nord qui ‘’dégueule’’ vers le Sud.
Pour ma part je suis très léger, dans les sacoches de la troisième roue je n’ai que le strict minimum pour dormir i.e la tente, le duvet, le matelas isolant, quelques fringues de rechange, une veste et une brosse à dent sans dentifrice car je suis l’hôte privilégié des Rustines et c’est plutôt confortable de faire du cyclo dans ces conditions !
Jérèm se détache rapidement et nous laisse Mimi et moi doser notre effort à notre convenance. Jérèm est impressionnant ! Le gaillard et son attelage c’est environ 110 à 120 kg dont facilement une quarantaine dans les sacoches, lancés à l’assaut du col. Ce qui est le plus impressionnant c’est son ‘’dépaulement ‘’ (du verbe bien connu dépauler !). Arc bouté et cramponné au guidon il tire sur celui alternativement d’un côté puis de l’autre tout en pompant avec ses épaules pour arracher le vélo.
Impressionnant vraiment et je comprends mieux pourquoi durant le périple trois jantes et une roue libre n’ont pas résisté. Je me demande parfois si la jante arrière ne tourne pas dans le pneu arrière à la vue de toute cette énergie dispensée !!!
Micha en comparaison c’est une petite gazelle, bien droite sur son biclou elle mouline tranquillement et gravi sans trop d’effort les pentes soutenues. Son vélo est bien équilibré et avec ses énormes sacoches, vu de loin on croit qu’elle chevauche une Harley.
Nous ne sommes plus très loin du col mais Jérèm redescend vers nous et nous annonce qu’ils viennent de franchit la barre des 14000 kilomètres depuis leur départ 10 mois auparavant. Beau challenge pour nos Rustines qui mettent toute leur énergie dans cette bambée autour du globe.
Le rituel est de mise pour immortaliser l’instant avec une Rustine de plus et là aussi je suis fier de poser à leurs côtés avec en arrière-plan la Tête de Garnesier.
On fête ces 14000 kilomètres avec le Délice Suprême ! Késako ??? C’est le secret de notre forme légendaire dans la famille Boniface donc je n’en dirais pas plus….
Le vent a cessé au col et nous en profitons pour faire notre halte du déjeuner. La suite est tout simplement grandiose même si nous connaissons bien le Dévoluy et si nous identifions bon nombre de sommets avec pour ma part un clin d’oeil particulier au Grand Ferrand et son Chorum Olympique. Une grosse pensée à Olivier, Patrice, Régis, Jean-Louis, Jean-François, Karim, Ded, Gillou, Criss, tous nos amis de rando avec qui nous venons régulièrement dans le secteur en hiver dévaler ces pentes magnifiques. Très vite nous arrivons dans le joli défilé de la Souloise surplombé par les falaises des deux Brechons pour nous laisser glisser jusqu’à Pellafol au pied de la star du coin l’Obiou où nous avons décidé de monter le bivouac.
L’hospitalité made in Pellafol
Echaudé par l’orage de la nuit précédente nous décidons de tester l’hospitalité Française dans le style ‘’j’irai dormir chez vous’’. Pour les Rustines ce n’est qu’un bis repetita placent, en effet depuis des mois ils pratiquent et partagent volontiers l’hospitalité des autochtones qui leurs proposent le gîte et le couvert ou tout simplement un endroit pour planter leur tente avec si possible un point d’eau pour la toilette qui reste l’incontournable de l’étape si on souhaite voyager dans de bonnes conditions et en bonnes santé.
Toc toc toc à la porte de la secrétaire de mairie de Pellafol qui avec pas mal d’hésitations nous propose après avoir consulté son mari leur bergerie qui vient d’être nettoyée ! Gloups !!!
Au passage sur la place du village un habitant au demeurant sympathique gratifie Micha d’un carton rouge car celle-ci pédale avec des sandales et ça ce n’est pas conseillé dixit le brave homme ! Re-Gloups !!!
Et nous voilà partis pour la bergerie située au centre du hameau de La Croix De La Pigne juste derrière l’énorme église comme on en voit beaucoup dans le Trièves. Heureusement que la bergerie a été nettoyée car l’odeur des crottes de brebis et encore bien persistante. Mais bon il y a un toit, un tuyau d’eau pour se prendre une douche en pleine nature face au plateau Matheysin, le Beaumont et les Ecrins. Le ciel n’est pas réellement menaçant et nous avons déjà dans nos têtes un plan bis pour planter les tentes juste devant l’église dans la belle herbe verte et c’est ce que nous déciderons voyant que la bise du Nord chasse allègrement tous les gros nuages menaçants. Prudents tout de même nous prendrons notre dîner seuls dans le hangar après que l’agriculteur nous propose celui-ci se rendant bien compte que son hospitalité dans sa bergerie était un peu déplacée d’autant plus qu’il est lui-même cyclo !
Les Français sont méfiants de prime abord et ce soir-là fut très éloquent vis-à-vis de cette méfiance que nous avons pour l’étranger. Juste en face de nous, à 30 mètres à peine de nos tentes deux voisins nous épiaient discrètement ou plutôt nous regardaient avec curiosité. Il est vrai que trois cyclos voyageurs qui débarquent avec tout le barda qu’ils trimballent ça ne passe pas inaperçu ! Eh bien aucun d’eux n’est venu voir qui nous étions, ni s’inquiéter d’où nous venions et où nous allions ou tout simplement nous demander si nous avions besoin de quoi que ce soit alors que le lendemain matin allant saluer l’un d’entre eux, je sentais, après lui avoir raconté brièvement ce que faisait les Rustines, beaucoup de remords en m’avouant qu’elle voulait nous proposer un café et qu’elle n’avait pas osé nous déranger…
Belle nuit étoilée à peine dérangé par ces abrutis de chiens qui ne peuvent s’empêcher d’aboyer chaque fois qu’un mulot ou qu’une pipistrelle bougent une oreille dans le coin.
La boulangère et le cycliste
Tut tut tut ! Tiens tiens tiens, c’est le boulanger qui arrive me dis-je en continuant de plier ma tente. Cela me rappelle mon enfance ou le camping dans la France profonde avec ce service presque à domicile qu’offrent les vendeurs ambulants.
Eh bien non c’est Françoise qui arrive et se jette dans les bras de son fils qu’elle n’a pas vu depuis six mois. Mais je n’étais pas tout à fait loin du boulanger, Françoise nous a gâté de viennoiseries. Vincent quant à lui arrivera quelques dizaines de minutes plus tard. Il se doutait que le programme cyclo de la journée i.e une balade dans le Trièves autour de Mens ne le fatiguerait pas beaucoup. Il a décidé de prendre un acompte et Françoise l’a déposé quelques kilomètres avant notre campement. Embrassades, retrouvailles, émotions, soutires, regards qui ont du mal à retenir les larmes de bonheur ! Nous nous sentons tous bien, en harmonie et heureux de partager ce moment.
Les Rustines m’échappent, ils ne sont plus à moi tout seul et je vais partager un peu à reculons je dois le dire leur présence et leur quotidien avec Françoise et Vincent. Le programme de la journée est une boucle dans le Trièves avec Françoise qui repartira en fin de journée sur Vaulnaveys. Eh oui ! N’est pas Rustines retraitéee qui veut !!
Et c’est parti mon Kiki comme le dit si bien ma petite Marion !
Balade des cyclos heureux dans le Trièves
Il fait grand beau et le vent du Nord qui a chassé les nuages de la veille nous offre une luminosité exceptionnelle. L’Obiou rayonne en maîtres des lieux et imposent ses différentes facettes à chaque virages. Les Rustines sont de retour et on sent bien qu’ils sont heureux de se retrouver dans des paysages familiers. Au loin le Vercors est bien visible et la cuvette Grenobloise également. Le Tabor, le Piquet de Nantes, le Coiro et le Taillefer entre autres nous font face et nous rappelle de bons moments partagés ensemble à glisser sur leurs pentes.
Les blés sont presque mûrs et nous offrent de doux tapis bordés de champs de tournesols avec en arrière-plan le bleu limpide du Trièves et la caractéristique prairie sommitale du bonnet de Calvin.
L’arrivée sur Mens par le col de St Sébastien est une plongée dans le cœur du Trièves et une plongée dans une campagne paisible où tous les hameaux sont en harmonie avec le décor alentour. La route défile à toute vitesse nous prenons un grand plaisir tous les quatre à rouler en file indienne pour retrouver Françoise à Mens qui nous attend pour la pause du déjeuner dans e centre de Mens.
L’après-midi se sera la balade des cyclos heureux dans le Trièves qui vont de col en col et de fontaines en fontaines. Il fait très très chaud et le moindre passage à l’ombre est exploité systématiquement pour se rafraîchir et s’hydrater.
Dans la magnifique Fontaine de Prébois nous prolongeons nos ablutions un peu plus longtemps afin de faire tomber la température mais l’orage menace déjà et il est temps de retourner sur Mens pour se mettre à l’abri. Bingo ! Au bord de la route l’œil Mimi vient de repérer un billet de 20 euros tombé de la poche de son propriétaire. Belle aubaine pour nous offrir une glace au village.
Ça marchait aussi bien il y a cinquante ans dixit Pascal !
Ce soir nul besoin de chercher un coin pour bivouaquer ! Françoise et Vincent ont négocié avec leur ami Pascal qui vit à St Jean-d’Hérans la possibilité d’installer nos matelas sous sa véranda.
Ce n’est pas réellement l’hospitalité telle que nous la voyions mais bon nous sommes assurés de ne pas être trempés par une averse pendant la nuit et finalement vu l’état de la maison de Pascal il vaut peut-être mieux se trouver à l’extérieur qu’à l’intérieur.
Visiblement Pascal est un bricoleur peut-être pas encore de génie mais il ne recule devant rien pour gagner de l’espace. Au milieu de la pièce principale de son habitation de belles étais soutiennent la charpente pour remplacer le mur porteur que Pascal a dégagé avec force en passant un câble relié à sa voiture par la fenêtre !!!
Pascal remonte le temps également et considère que tout était bien mieux il y a cinquante ans, donc adieu le chauffe-eau électrique et bonjour le four solaire pour chauffer une gamelle d’eau. Nous laissons donc Vincent prendre sa douche à la manière Mandi Indonésien comme il y a cinquante ans. Pour quatre c’est un peu juste pour la douche donc Mimi Jérèm et moi préférons le tuyau d’eau au fond du jardin que nous avons des difficultés à percevoir car c’est bien connu il y a cinquante ans on ne coupait pas l’herbe toutes les semaines.
Petite entorse à la règle du tout était bien mieux il y a cinquante ans, Pascal possède un lave-linge et Mimi lui fera remarquer plus tard ce manque de cohérence dans son choix de vie.
Nous partons en voiture avec Françoise dîner à Mens dans un petit resto au cœur du bourg. Pascal lui a rendez-vous avec une bande d’allumés du coin qui s’est battue et qui a réussi à faire revivre une radio locale. Ils ont rendez-vous dans un bar du coin et chacun vient avec son repas tiré du sac.
Pascal choisira la facilité et c’est par pur hasard que nous le voyons arriver dans l’établissement où nous sommes attablés pour commander sa pizza.
Qu’à cela ne tienne on invite Pascal à se joindre à notre tablée et nous découvrons un personnage attachant, marqué par des idées bien à lui mais pas chiant pour autant avec celles-ci. Bien au contraire il est très ouvert sur les autres et s’intéresse activement et sincèrement au voyage des Rustines. Il nous parle également des voyages qu’il organise en tant qu’accompagnateur ou guide je ne sais plus et cette soirée est vraiment très agréable.
Nous rentrons sous notre véranda, Françoise nous quitte et alignés comme les sardines de la Belle îloise nous plongeons dans nos rêves.
Annette et Clément, Tizou et Pierre
Aujourd’hui on en connait une qui doit trépigner d’impatience. C’est Annette qui se languit terriblement de sa petite Emilie et qui me harcèle de texto pour connaître notre itinéraire et venir nous rejoindre. Pierre et Tizou sont également sur le pont mais ça les Rustines ne le savent pas. En théorie nous devons bivouaquer pas trop loin du rendez-vous du jour J i.e demain Dimanche 26 Juillet mais pour le moment nous devons gérer l’effort pour nous rendre de St Jean-d’Hérans au plateau Matheysin en passant par le pont de Cognet, St Aray et les corniches du Drac pour les connaisseurs. Ce n’est pas réellement une longue étape en soi mais les bosses à négocier avec des vélos chargés comme ceux des Rustines restent des bosses respectables.
Il fait beau, ça sent l’écurie donc on prend notre temps et nous savourons les belles corniches qui ne nous cachent pas la couleur si éclatante du lac de Monteynard. Le mont Aiguille lui joue à cache-cache avec quelques langoureux cumulus qui se forment sur le Vercors. Il est encore un peu tôt, Eole n’est pas encore monté suffisamment en puissance pour ravir les kit-surfeurs mais bien suffisant pour nous demander un peu plus d’effort.
On s’en fiche, nous ne sommes pas pressés et nous savons parfaitement qu’Annette a mis les bouchées doubles pour nous préparer un pique-nique de retrouvailles digne de ce nom.
Mais Annette n’en peut plus d’attendre, avec Clément ils décident de venir à notre rencontre et la jonction se fait en pleine grimpette à la Motte Saint-Martin. Annette est encore à 200 mètres de nous mais elle nous crie tous ses encouragements. Les larmes de joie et de bonheur envahissent immédiatement les joues d’Annette et de Mimi. C’est très émouvant de les regarder toutes les deux. Annette s’est beaucoup investie dans le voyage des Rustines et Skype ne lui suffisait pas à combler le vide qu’elle éprouvait.
Clément est bien fier également de retrouver sa sœur et on sent bien que les mots sont parfois dérisoires pour partager un moment intense comme celui-ci.
Après cette forte séquence émotion il nous faut remonter sur les vélos pour trouver un endroit où nous pourrons pique-niquer. Je me souviens alors de ce joli étang du Crey niché au pied de la Pierre Percée et c’est donc ici que nous allons nous rendre. Je me félicite encore de ce choix car cet étang est une zone de pêche très agréable et très bien aménagée avec de l’eau, des toilettes sèches et quelques tables à l’ombre.
Le pique-nique est ‘’énorme’’ et nous nous régalons tous. Le choix du bivouac est évident et vite fait, nous ne sommes qu’à quelques kilomètres de Nantes en Ratier pour le premier rendez-vous de demain matin avec le groupe ‘’à nous les Tit’s Rustines’’. C’est donc ici que nous allons nous installer pour la nuit mais auparavant un petit texto à Pierre s’impose pour lui indiquer où nous sommes.
Tizou et Pierre arrivent discrètement et surprennent les Rustines par leur présence inattendue. Quel bonheur de retrouver les amis qui eux aussi sont venus les bras chargés de victuailles et de boissons pour fêter le retour attendu.
Soirée vraiment très sympathique à discuter de chose et d’autres avec un Pierrot en pleine forme qui nous raconte sa version du tour de France !
Tizou et Pierre ont posé le California pas très loin de nous sur le parking et passeront la nuit à nos côtés.
Jérémie qui commence à en avoir marre de son studio ambulant en toile lorgne la possibilité de squatter le California et la visite détaillée que Pierre lui fait faire le laisse bien rêveur pour les futurs escapades !
Dans l’excitation ambiante nous faisons l’erreur du campeur débutant qui est de ne pas vérifier où nous posons la tente et dans la nuit il faudra sortir le gonfleur pour regonfler le matelas qui n’a pas du tout apprécié les tiges bien drues et perçantes des herbes fraîchement coupées.
Le lendemain matin, le jour J de la rencontre avec le groupe ‘’je suis Rustine’’ qui nous attend au lac de Pierre-Châtel après avoir pris au passage le groupe ‘’à nous les Tit’s Rustines’’ nous nous régalons tous ensemble d’un bon petit-déjeuner dans un cadre magnifique au bord de cet étang.
Et c’est parti mon Kiki pour les retrouvailles…
A partir de ce moment je sens bien que les Rustines sont déjà loin de moi et ne m’appartiennent vraiment plus du tout je leur laisse donc le clavier pour vous narrer le ressenti de ces retrouvailles.
Difficile de mettre des mots sur ce que l’on ressent en passant nos derniers coups de pédales qui nous conduisent près du lac où nos familles et nos amis se sont réunis pour nous accueillir. Tous les souvenirs de notre aventure se chevauchent et s’entremêlent dans notre tête. Notre voyage se dirige doucement vers le chemin du souvenir.
En roulant à travers les montagnes et les paysages que nous connaissons tant, nous avons l’étrange sensation de n’être jamais réellement parti. Nos vélos nous portent jusqu’à l’église de Nantes en Ratier où nous retrouvons Christine, Jean-Philippe, Elisa et Julie venus parcourir les quelques kilomètres qui nous séparent du lac. Sur le chemin nous retrouvons Caroline, Marc, Mélissa et Lucas qui se joignent au peloton final. Nous atteignons enfin le lac. L’excitation est à son comble, nous avons tant de fois imaginé cet instant, on se demande qui va être présent, va-t-on reconnaître tout le monde, avons-nous changé ? Bref, nous n’avons pas le temps de répondre à nos questions que nous apercevons déjà des frimousses qui ne nous sont pas étrangères. La joie nous inonde, nous embrassons chacun et chacune et profitons pleinement de cette après-midi ensemble. Le ciel se couvre en fin de journée, il est temps pour nous de rentrer. Franchir les derniers kilomètres qui nous ramènent à la maison et de refermer cette belle parenthèse qu’est notre voyage.
A la rencontre de Marion pour boucler la boucle
Après cette belle après-midi passée au bord du lac avec les amis, la famille il est grand temps pour les Rustines dont les deux Rustines retraitées que nous sommes Vincent et moi de prendre le chemin du retour à la case départ.
Les Rustines sont partis d’Herbeys et c’est là où nous allons nous diriger pour boucler la boucle. Nous longeons les lacs de Laffrey au pied du Tabor et de l’Alpe du Grand Serre. Vincent et Jérémie partent devant et tentent une échappée mais le pays Matheysin c’est un peu mon jardin secret alors je sors la botte secrète et finalement nous arriverons bien avant eux et les attendrons à Cholonge avant de plonger sur Séchilienne par cette petite route bien prisée des cyclos de la région.
Nous traversons Vizille après avoir été noyés dans le flot des vacanciers un court instant. Direction Uriage et petit stop à Vaulnaveys le haut pour dire simplement à bientôt à Vincent.
Nous nous retrouvons tous les trois sur un banc d’Uriage à grignoter des céréales. Les passants nous regardent et nous sourient, on sent que pour certains ce sont des regards envieux et pendant un court instant l’étincelle qui brille dans leurs yeux me laisse vraiment admiratif également des Rustines et de leur périple.
Le final c’est la montée vers Herbeys par Villeneuve d’Uriage, une parenthèse quoi ! Mais l’excitation est bien trop grande pour Mimi de retrouver sa sœur Anne-Elodie et sa petite Marion qui du haut de ses deux ans et demi attend avec impatience Tati Mimi et Tonton éémi après avoir suivi leurs aventures par Skype interposé. Elles ne pouvaient pas toutes les deux nous retrouver au lac c’est donc à la maison que ce feront ces retrouvailles.
Jérèm nous fausse compagnie pour aller saluer d’éventuels potes aux terrains de tennis d’Uriage. Nous soupçonnons fortement qu’il va troquer rapidement dans la semaine qui suivra son vélo contre sa raquette !
On se positionne en mode moulinette et nous avalons cette grimpette bien raide les doigts dans le nez !
On savoure vraiment les tous derniers kilomètres, Jérèm nous a rejoint et nous propose de tourner la séquence finale du film qu’il souhaite monter pour relater cette année à vélo.
On surprend Annette, Clément, Anne-Elodie et Marion en arrivant en vélo sur la terrasse de la maison après avoir pris au risque d’une crevaison le sentier derrière la maison.
Marion en a perdu sa voix et ses yeux ne se détachent plus de Tati Mimi et Tonton éémi. Mais c’est dans mes bras qu’elle se réfugie pour mieux les épier avec un peu de difficulté semble-t-il à reconnaître qui se cache réellement derrière la barbe de Tonton éémi.
Encore une belle soirée en famille, la colocation avec les Rustines reprend. De colocataires ils deviendront nos futurs voisins sous peu, le temps pour eux de rafraîchir et d’effectuer quelques travaux dans ‘’la maison de Pépé Mémé’’ qu’ils vont investir prochainement. Une autre aventure qui démarre !
Merci les Rustines pour cette semaine, merci d’avoir pris grand soin de moi, j’ai vraiment apprécié ce moment privilégié à partager votre quotidien et encore une fois bravo pour avoir osé passer du rêve à la réalité.
Mille bisous à vous deux!
Pa’